Le Japon
Une première fois
Ce silence des images

En haut du mont Fuji, je me suis assis et, au lever du soleil, j'ai contemplé ce pays endormi qui s'étendait devant moi, ce pays contrasté et silencieux, toutes ces formes que j'avais fantasmées. C'était ma première fois au Japon, j’avais attendu ce voyage depuis longtemps, et déjà, sous ces épais nuages, mes souvenirs et mes fantasmes se mélangeaient et se dissipaient doucement. De ce séjour de vingt jours, il ne resterait bientôt plus que ces contrastes, ce système graphique posé au-dessus du temps, comme des griffures de lumière dans la mémoire. Et il s’agirait alors d’une série sur le Japon, d’une série sur le silence des images.

Plus tard, à mon retour, je tombai sur le texte de Barthes :

« Ne décrivant ni ne définissant, le haïku (j'appelle ainsi finalement tout trait discontinu, tout événement de la vie japonaise, tel qu'il s'offre à ma lecture), le haïku s'amincit jusqu'à la pure et seule désignation. C'est cela, c'est ainsi, dit le haïku, c'est tel. Ou mieux encore : Tel ! dit-il, d'une touche si instantanée et si courte (sans vibration ni reprise) que la copule y apparaîtrait encore de trop, comme le remords d'une définition interdite, à jamais éloignée. Le sens n'y est qu'un flash, une griffure de lumière. »

L'Empire des signes, Roland Barthes

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